Cap sur les exportations avec team Nouvelle-Calédonie export
L'ouverture de la Nouvelle-Calédonie vers les marchés à l'international constitue une voie de diversification et un relais de croissance possible pour redynamiser son économie. Un projet ambitieux qui demande un gros travail de préparation et des orientations stratégiques claires. Ainsi, la CCI-NC s'affaire à déployer, avec ses partenaires – l'État, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, Business France et Bpifrance –, Team Nouvelle-Calédonie Export dans l'objectif d’élaborer un maillage simple et cohérent entre tous les acteurs de l’export et d’accompagner les entreprises via un « parcours client » efficace.
La Nouvelle-Calédonie doit installer un modèle économique durable pour retrouver la prospérité. Un « changement de logiciel » qui nécessite pour le territoire de développer son autonomie économique et donc de rééquilibrer sa balance commerciale. En 2021, le déficit commercial s’établissait à 95,7 milliards de francs CFP (biens et services), en hausse de 7 milliards par rapport à 2020*. L'archipel doit d'une part réduire ses dépendances vis-à-vis de l’extérieur (énergétique, alimentaire, etc.), et d'autre part, développer ses exportations.
Autre argument, le problème de masse critique de la Nouvelle-Calédonie et son marché étroit. « Les entreprises calédoniennes ont d'abord cherché à satisfaire le marché domestique. Certains secteurs ont atteint un seuil de maturité et doivent donc aller chercher des relais de croissance ailleurs », indique David Guyenne, président de la CCI-NC. « Avec une économie centrée sur le nickel, on ne ressentait pas vraiment le besoin de se tourner vers l'extérieur, signale Guillaume Martineaud, mais la donne a changé depuis. La Nouvelle-Calédonie, comme la Polynésie française ou Wallis-et-Futuna, ont longtemps vécu dans une bulle au sein du Pacifique, avec très peu de relations avec les pays de la région », regrette l'élu de la Chambre en charge du commerce extérieur. La petitesse de son marché intérieur, ajoutée au manque de compétitivité, posent la problématique. La Nouvelle-Calédonie doit aller conquérir de nouveaux marchés à l’extérieur pour regagner le chemin de la croissance économique.
* Balance des paiements 2021 de la Nouvelle-Calédonie, IEOM.
Première édition du French Pacific Business Forum, un événement économique coorganisé par plusieurs partenaires du Pacifique à Auckland.
Renforcer la coopération et les relations régionales
« Une partie de l'avenir économique se trouve dans le développement de nos relations avec les pays voisins, assure David Guyenne. Plusieurs raisons permettent de dire que c'est le bon moment. Au niveau géopolitique, la région Pacifique a acquis une importance particulière à l'international. Elle concentre des enjeux en termes de ressources naturelles, alimentaires et face à l'adaptation au changement climatique. Pour garantir la stabilité et la prospérité de ces petits pays, un certain nombre d'investissements doivent être réalisés dans le cadre d'un modèle durable et d'économies moins carbonées. Enfin, la conjoncture actuelle, avec des économies en souffrance nous obligent à chercher de la prospérité à l'extérieur, donc à renforcer nos échanges au sein de la zone », ajoute le président de la CCI.
Dans ce contexte, la Nouvelle-Calédonie dispose d'atouts. Comme l'a encore rappelé le président de la République lors de sa dernière visite, le territoire compte dans la stratégie indopacifique de la France. Avec son appui, il peut devenir une référence dans la région sur l'accompagnement au changement climatique et la préservation de la biodiversité. Son rattachement à l'Union européenne, qui déploie des programmes de financement dans la région et véhicule une image de qualité, joue également en sa faveur.
Au niveau géopolitique, la région Pacifique a acquis une importance particulière à l'international.
Ainsi, les entreprises calédoniennes peuvent trouver dans les petits États du Pacifique, des marchés à leur taille, où faire valoir leurs compétences. Au-delà des échanges de biens, des opportunités d'export de services et d'expertise sont réelles. Selon le collectif NC ÉCO, « les champs d’échange potentiels (...) portent sur le capital humain (culture, ingénierie), la géostratégie (protection des ressources et territoires), l’économie et l’industrie (équipements et infrastructures) et sur le capital naturel (gestion des risques climatiques) ». La Nouvelle-Calédonie est également considérée comme une référence dans les domaines de l'éducation, de la formation, du numérique, des services liés à l'environnement, etc.
Si les planètes semblent alignées, des freins demeurent toutefois pour nos entreprises : « barrière de la langue, problèmes de normes, règles phytosanitaires ou encore coût du transport », cite par exemple Guillaume Martineaud. Hors Australie et Nouvelle-Zélande, la solvabilité de la clientèle potentielle est aussi à prendre en compte. L'enjeu est désormais d'identifier précisément ces difficultés, marché par marché, afin de les lever.
Un soutien décisif pour les entreprises
Pour ce faire, la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie a décidé de s'appuyer sur la force du réseau national Team France Export. Ce dispositif est le fruit du partenariat entre les Chambres de commerce et d'industrie de Métropole et d'Outre-mer, dont fait partie la CCI-NC, Business France, un organisme d'État chargé d'accompagner les entreprises françaises à l'international, et Bpifrance, l'outil financier. La création de l'entité locale Team Nouvelle-Calédonie Export (TNCE) doit faire l'objet d'une convention signée entre les parties prenantes. Elle sera adaptée au territoire et notamment alignée avec les orientations stratégiques du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. Celui-ci est légitime à mener des actions de coopération économique par le biais du Service de la coopération régionale et des relations extérieures (SCRRE) et à négocier des accords commerciaux internationaux que TNCE pourra éclairer en fonction des attentes des entreprises. L'objectif est d'être également en maillage avec les acteurs locaux de l'export. « Nous reconnaissons ce qui a été fait par des pionniers comme le cluster NCT&I », rappelle David Guyenne.
Coup d'œil sur l'activité export
Les exportations en Nouvelle-Calédonie sont principalement constituées par les produits de l'activité du nickel qui ont la Chine pour premier client, la Corée du Sud et le Japon. Par conséquent, les échanges du commerce extérieur sont très dépendants de cette filière. Ainsi, au deuxième trimestre 2023, le montant total des exportations affichait une perte de 47 % en glissement annuel en raison du recul des ventes de ferro-nickel et de minerai*. Les produits de la mer et de l'aquaculture (thons, crevettes, holothuries) arrivent loin derrière, suivis des huiles essentielles. D'autres marchés de niche sont identifiés ou en perspective : chocolat, squash, miel, santal, vanille. En 2019, l’exportation vers l’Océanie pèse seulement 1 milliard de francs CFP, soit 0,5 % du total exporté, montrant ainsi le potentiel à développer avec les pays limitrophes.
* Note de conjoncture sur le commerce extérieur, 2e trimestre 2023, ISEE-NC.
Fort d'une centaine d'adhérents, « des grosses entreprises comme des PME », précise Christopher Lorho, co-président chargé du secteur des services, de l'Australie et de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le cluster a redéfini sa stratégie en 2023. « Notre objectif est de nous concentrer sur nos membres capables d'engager une démarche à l'export et de les accompagner. NCT&I est devenu un véritable club d'affaires qui offre un partage de réseau et d'informations et organise des missions commerciales dans les pays de la région. » En cette fin d'année, le cluster travaille, entre autres, en direction de la Papouasie-Nouvelle-Guinée où le groupe TotalEnergies lance la construction de Papua LNG, colossal projet d'exploitation de gaz naturel.
L'export connaît une réelle dynamique, mais cela nécessite aussi un soutien. Toutes les institutions calédoniennes ainsi que l'État ont leur rôle à jouer et doivent pousser dans le même sens.
En tant qu'établissement public, la CCI-NC a la responsabilité d'affirmer cette ambition et d'accompagner les entreprises pour qu'elles soient au rendez-vous de la volonté politique et des besoins de la région. Elle a également la légitimité pour mobiliser tout un réseau et des fonds au service des entreprises calédoniennes.
La compétitivité, une prérogative à l'export
« Aucune activité ne peut être basée sur les exportations et aucune structure n'est fondée avec pour objectif d'exporter. En général, cette étape arrive comme la cerise sur le gâteau d'un surplus d'activité permis par une compétitivité que l'on a créée sur son propre marché et qui permet de se frotter à la concurrence internationale », rappelle Guillaume Martineaud. Outils de production surdimensionnés, poids des charges fixes, aujourd'hui, les entreprises calédoniennes ne bénéficient pas de cet environnement au niveau du marché domestique. Une situation qui nécessite des changements structurels majeurs afin d'envisager un avenir export pour les entreprises calédoniennes.
3 questions à Luc Bourgade, directeur général de la Calédonienne des Eaux (CDE)
Pour quelles raisons la CDE s'est-elle engagée dans l'export ?
Luc Bourgade : La CDE fait partie du groupe Suez, reconnu pour son savoir-faire dans le domaine de la potabilisation des eaux. Des clients originaires du Pacifique Sud nous ont sollicités à l'occasion de congrès d'experts techniques. En parallèle, nous avons répondu à des appels d'offres lancés par des collectivités. Il nous fallait trouver d'autres pistes de croissance, car les charges qui pèsent sur notre métier varient peu en fonction de notre volume d'activité. Par ailleurs, nous constatons depuis une dizaine d'années une baisse de nos recettes en lien avec une réduction de la consommation d'eau. Celle-ci est en partie due à une prise de conscience des usagers par rapport à la préservation de la ressource.
Qu'exporte la CDE et dans quels pays ?
L. B. : Nous exportons essentiellement des usines pour produire de l'eau potable à partir d'eau brute. Nous intervenons dans la construction des unités de potabilisation, la formation, et parfois pour l'exploitation. Nous travaillons depuis plusieurs années aux îles Fidji et nous avons récemment remporté des appels d'offres aux Tuvalu et aux Kiribati. Nous essayons de nous développer en Papouasie-Nouvelle-Guinée, aux Samoa, à Palau et au Vanuatu.
Quels sont les freins que vous avez pu rencontrer ?
L. B. : La difficulté est de comprendre comment fonctionne chaque pays pour pouvoir répondre à ses besoins : normes et contraintes techniques, mais aussi qui décide, qui influence, qui paye ? Il est intéressant de pouvoir aider à la mise en relation entre les organismes internationaux de financement et les collectivités. À l'export, travailler en réseau est essentiel.
Usine installée par la CDE aux Fidji - © CDE
Le dispositif de team Nouvelle-Calédonie export
Fruit d'un travail multipartenarial en cours de finalisation, le dispositif Team France Export (TFE) en Nouvelle-Calédonie entend se positionner comme un acteur fédérateur et un accélérateur de la stratégie export du territoire au sein d'un écosystème structuré et dynamique. Objectif : aider les entreprises à oser l'export.
« L'un des objectifs de Team France Export en Nouvelle-Calédonie est d'offrir un guichet unique aux entreprises et un parcours complet d'accompagnement et de financement à l'international », indique Guillaume Martineaud, élu à la CCI et pilote du groupe de travail sur l'export. Portée par la CCI, en association avec l'État, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, Business France et Bpifrance, la structure locale Team Nouvelle-Calédonie Export pourra disposer d'un conseiller dédié, bras armé du dispositif. Sa première mission : développer une culture de l'export en sensibilisant et en informant les entreprises, puis les aider dans leurs premières démarches (diagnostic, évaluation du potentiel, structuration du projet, prospection, etc.).
Quel que soit leur niveau de maturité par rapport à l'export, toutes les entreprises pourront trouver une réponse à leurs besoins, notamment les plus petites qui n'auraient ni le temps, ni les moyens d'engager cette démarche. Pour les projets les plus matures, ce parcours doit déboucher sur un plan de développement à l'international avec l'appui de Business France et des solutions de financement de Bpifrance qui n'étaient pas disponibles jusque-là en Nouvelle-Calédonie. Normes, transports, réglementation et fiscalité douanières, langues, accès aux appels d'offres... Le conseiller devra également recenser les freins structurels à l'export.
L'un des objectifs de Team France Export en Nouvelle-Calédonie est d'offrir un guichet unique aux entreprises et un parcours complet d'accompagnement et de financement à l'international.
Soutenir la Calédonie dans sa stratégie export
Voici pour le volet opérationnel. Au niveau stratégique, l'ambition est de négocier des conventions de partenariat afin de constituer un réseau régional fort autour de Team Nouvelle-Calédonie Export. « Nous souhaitons y ajouter une coopération étroite entre la CCI-NC et les Chambres des autres territoires du Pacifique comme celles du Vanuatu, de Wallis-et-Futuna et de Polynésie française », explique David Guyenne. Une démarche qui s'inscrit dans la lignée du projet de développement de l'axe Singapour-Nouméa-Papeete, initié par les Chambres consulaires de ces trois territoires, pour densifier la coopération régionale en matière économique.
Plusieurs formes
Toutes ces initiatives ont pour objectif ultime d'aider les entreprises calédoniennes à étendre leur présence dans la région du Pacifique. « Cela peut prendre différentes formes, de l'exportation de produits et services à la recherche de partenariats locaux (joint-ventures) jusqu'à l'installation de filiales pour établir une présence commerciale dans ces pays », détaille le président de la CCI. Des marchés prioritaires - Vanuatu, Fidji, Papouasie-Nouvelle-Guinée - sont identifiés. En veille constante, Team Nouvelle-Calédonie Export avancera en fonction des opportunités économiques des entreprises, mais aussi des grands projets d'investissements publics des pays de la région.
Mission économique à Singapour
Dans le cadre du projet de développement de l'axe Singapour-Nouméa-Papeete, lancé par les Chambres consulaires de ces trois territoires dont la CCI-NC, des entreprises calédoniennes et polynésiennes se sont rendues dans la « ville jardin » fin octobre. Cette mission économique représente un premier pas pour accompagner les entreprises locales vers la conquête de nouveaux marchés. Pour en savoir plus, lire aussi notre article consacré à la première mission économique à Singapour.
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